Universités privées au Togo : Le gouvernement veille au grain pour un enseignement de qualité

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Ihou Nazoba Majesté Wateba, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

L’enseignement supérieur est un service public d’intérêt général. Il forme, pour toutes les branches de l’activité nationale, des spécialistes et des chercheurs capables d’intervenir et d’innover dans tous les domaines. Pour ce faire, il met en œuvre des méthodes et des moyens  en vue d’un développement économique, social, culturel et artistique du pays.

L’enseignement supérieur a une mission d’éducation, de formation et de recherche, ainsi que des services à la communauté notamment (i) dispenser une formation scientifique, culturelle et professionnelle, dans ses dimensions initiale et continue, (ii) former des diplômés et des citoyens responsables capables de s’intégrer dans tous les domaines de l’activité humaine (iii) promouvoir, créer et diffuser les connaissances par la recherche et fournir l’expertise appropriée pour aider au développement culturel, social et économique du pays.

Mais depuis environ 30 ans, le monde de l’enseignement supérieur connaît une explosion des demandes de formations et une saturation des universités publiques qui n’arrivent plus à contenir les flux. Cela a conduit les gouvernements à ouvrir le secteur de l’éducation aux secteurs privé et confessionnel qui parfois accueillent plus d’étudiants que le secteur public.

Selon un rapport d’évaluation des établissements privés d’enseignement supérieur, le secteur privé de l’enseignement supérieur au Togo, représente 20 à 25% de l’ensemble des étudiants.

Cependant, cette floraison d’établissements privés d’enseignement supérieur observée ailleurs et au Togo n’est exempte d’insuffisance tant qualitative que procédurale.

Même si le cahier des charges de 2014, inspiré des textes du CAMES, constitue la base d’un bon contrôle de ces établissements, cette situation nécessite une adaptation, une révision des offres de formations pour répondre aux exigences et aux normes requises pour garantir la qualité des diplômes qui en découlent.

Par exemple en France, sur plus de 3000 établissements privés d’enseignement supérieur, seuls 171 à la date du 20 mai 2021 sont autorisés à délivrer des diplômes d’équivalence BAC+3 et BAC+5 dans les seuls domaines du commerce et de gestion. Dans le domaine de l’ingénierie, ces établissements sont contraints de le faire en cotutelle avec les établissements publics. Quant au doctorat, il relève exclusivement du domaine des écoles doctorales publiques et aucun établissement privé d’enseignement supérieur n’est autorisé à le délivrer.

Rejet d’un grand nombre de diplômes délivrés par les établissements privés

Au Togo, on assiste au rejet d’un grand nombre de diplômes délivrés par ces établissements privés à l’homologation et dans les universités publiques occidentales. Situation qui a poussé le Ministère de l’enseignement supérieur a initié avec l’appui financier du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) une évaluation des offres de formations réalisée par des experts/évaluateurs nationaux et internationaux entre le 20 décembre 2020 et le 30 mai 2021.

Objectifs visés par le gouvernement : répertorier et réaliser la cartographie des établissements privés d’enseignement supérieur, identifier les offres de formations mises en œuvre, vérifier la qualification du personnel enseignant et administratif et faire l’état des lieux des infrastructures existantes.

Les résultats obtenus, ont permis de relever certains éléments sur : la cartographie des établissements privés d’enseignement supérieur, les offres de formations, le répertoire du personnel enseignant et du personnel administratif, l’état des lieux des infrastructures et les autres diligences examinées conformément au cahier des charges.

Concernant la cartographie des établissements, 74 sites principaux, y compris 6 sites secondaires représentatifs de 68 établissements, sont immatriculés au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. 53 sites d’enseignement représentatifs de 47 établissements ont participé à l’évaluation (71,5%). Et 21 établissements n’ont pas participé (3 pour fermeture volontaire, 2 restés injoignables et 16 indifférents.

S’agissant des offres de formations, 44 sur 47 offrent des formations agréées par le ministère et 37 sur les 47 délivrent des diplômes non reconnus par CAMES. 5 sur 47 ont certains masters reconnus par le CAMES et 2 sur les 47 forment sans autorisation. 4 sélectionnés au hasard n’ont pas de syllabus et 16 sur 47 ne finissent pas leur programme conformément au syllabus.

« Beaucoup d’établissements pratiquant le LMD (Licence, Master, Doctorat) délivrent le même diplôme pour une formation donnée, mais n’enseignent pas les mêmes leçons, ou n’ont pas les mêmes volumes horaires ni les mêmes nombres de crédits, mais arrivent à totaliser les 180 crédits pour la licence alors même que la soutenance de la licence que certains ne font pas vaut à elle toute seule 30 crédits », relève une source proche du ministère.

En ce qui concerne le répertoire du personnel enseignant, le personnel enseignant et administratif est essentiellement réglementé par les articles 19 et 20 du cahier des charges pour les demandes de création, d’ouverture, d’habilitation et d’agrément des établissements privés d’enseignement supérieur au Togo.

«Sur un échantillon aléatoire observé lors de la visite des sites, le constat suivant a été fait : (i) 5 établissements sur les 47, soit 11% ne respectent pas la disposition de l’article 19, (ii) 11 établissements sur les 47, soit 23% n’ont pas de contrats de travail avec leurs enseignants et (iii) 7 établissements sur les 47, soit 15% n’ont pas le curriculum vitae et la copie du dernier diplôme de certains enseignants dans leur dossier et n’ont pu en fournir pendant l’évaluation.

Par rapport aux autres diligences examinées conformément au cahier des charges, plusieurs faiblesses en opposition avec le cahier des charges ont été relevées notamment l’admission des étudiants en Master sans soutenance de Licence dont 4 de façon systématique alors que la soutenance est un examen qui vaut 30 crédits, l’absence de système de sécurisation des diplômes chez 6 établissements (code QR, code barre, cachet sec, papier personnalisé).

Plusieurs recommandations

Plusieurs recommandations ont été formulées dans le rapport, par les évaluateurs : encourager un renforcement de la coopération entre le ministère et les établissements privés d’enseignement supérieur de manière que les décisions tiennent compte de l’opinion des acteurs et exhorter le ministère à la mise en place d’un cadre permanent de discussion avec les établissements privés d’enseignement supérieur pour discuter des enjeux auxquels les deux parties sont confrontées, et les moyens d’apporter des solutions satisfaisantes.

Il a été également suggéré, la mise en place d’un mécanisme efficace de suivi en matière de financement, de renforcement de capacités, de transfert de connaissance pour répondre à certaines lacunes observées et relevées, l’harmonisation des syllabus et curricula d’enseignement au niveau de chaque filière et parcours du système LMD.

Les évaluateurs ont aussi suggéré des études approfondies devant aboutir à l’harmonisation des examens pour les matières fondamentales au niveau de chaque filière et parcours du système LMD et l’officialisation des dispositions d’une nouvelle version du cahier des charges épurées des imprécisions par un décret présidentiel, afin de lui conférer un caractère officiel. FIN

Junior AUREL